Ceux qui me suivent depuis un moment savent que j’ai été un grand fan de foncières. J’ai investi pendant des années dans de nombreuses SIIC françaises et REITs nord-américaines avec un certain succès. Ce n’est que récemment que j’ai réorienté mon portefeuille vers des valeurs de croissance. Je reste toutefois convaincu de l’intérêt des foncières en bourse même pour des personnes qui n’ont a priori aucun intérêt pour l’investissement boursier.
Dans cet article, je vous propose de vous expliquer pourquoi toute personne voulant se constituer un revenu complémentaire gagnerait à investir en foncières cotées plutôt que dans des SCPI, dans de l’immobilier en direct ou dans tous les montages à la con qu’on peut lui proposer.
Un statut fiscal avantageux
De part et d’autre de l’atlantique, des statuts spéciaux ont été créés pour les sociétés immobilières cotées en bourse. Il s’agit des SIIC (Société d’Investissement Immobilier Cotée) en France et des fameuses REITs (Real Estate Investment Trust) aux États-Unis et au Canada.
La grande particularité de ces statuts est de ne pas soumettre ces entreprises à l’impôt sur les sociétés (IS) ! Il n’y a toutefois pas de free lunch. Cette exonération souffre d’une contrepartie : ces sociétés sont obligées de distribuer sous forme de dividende une part importante des loyers et des plus-values qu’elles réalisent.
Vous l’aurez compris, si les foncières ne sont pas soumises à l’IS, le fisc s’y retrouve en percevant l’impôt sur les dividendes qu’elles versent. Les investisseurs qui ont le plus intérêt à opter pour les SIIC ou pour les REITs sont donc ceux qui ont un faible taux d’imposition. On va y venir.
Quels investisseurs ont intérêt à opter pour les foncières cotées ?
Les investisseurs avec un faible taux d’imposition
Sur le plan purement fiscal, les investisseurs avec un faible TMI (Taux Marginal d’Imposition) ont tout intérêt à invertir dans des foncières cotées. Par exemple, un investisseur qui ne paye pas d’impôts ne subira que les prélèvements sociaux sur les dividendes provenant de la foncière. Autrement dit, il ne payera que 17,2% sur les dividendes perçus. Ce n’est vraiment pas beaucoup si on se souvient que la foncière ne paye elle-même pas d’impôts ! On n’est pas très loin de percevoir directement les loyers après paiement des frais de la foncière.
Attention tout de même, certaines REITs étrangères subissent un prélèvement à la source (15% pour les REITs US par exemple) que l’investisseur avec un faible taux d’imposition ne pourra peut-être pas récupérer intégralement (voir infra).
Les investisseurs avec un fort taux d’imposition
Tous les investisseurs peuvent aujourd’hui opter pour la « flat tax » de 30% sur les revenus d’actions. C’est un avantage indéniable pour les personnes avec un fort TMI ! Surtout par rapport à des revenus immobiliers qui restent taxés au TMI (Taux Marginal d’Imposition) auquel s’ajoutent les inévitables prélèvements sociaux. En clair, si vous subissez un taux d’IRPP de 45%, vous allez payer 45% + 17,2% soit 62,2% des loyers perçus moins les frais (ou moins 30% au micro foncier). De quoi dissuader les plus volontaires !
Les dividendes des foncières cotées peuvent eux bénéficier de la « flat tax » de 30%, même si votre taux d’imposition est bien plus élevé. Les foncières peuvent donc être un véhicule intéressant pour ceux qui veulent invertir dans l’immobilier de rendement malgré un fort TMI.
Les investisseurs en quête de rendement
En termes d’investissement, les foncières cotées devraient séduire tous ceux qui veulent investir dans l’immobilier pour le rendement. Les avantages sont en effet nombreux par rapport aux SCPI et à l’immobilier locatif en direct.
Quels sont les avantages des foncières cotées par rapport aux SCPI ?
SIIC ou SCPI ? Voilà la question que beaucoup d’investisseurs en « pierre papier » se posent.
Pour beaucoup, les SCPI sont le produit « pierre papier » par excellence ! On en entend beaucoup parler dans les médias financiers qui n’hésitent pas à les présenter comme « de l’immobilier sans les tracas de la gestion ». Ce qu’on oublie de vous dire, c’est que ce sont des produits bourrés de frais ! Ces frais permettent d’ailleurs aux sociétés de gestion de se payer des campagnes de pub dans ces mêmes médias. Objectivité quand tu nous tiens.
Le premier des frais inhérents aux SPCI, ce sont les droits d’entrée. Ils ne sont pas négligeables. Il n’est pas rare de voir des frais de plus de 10%, parfois 13% ! Donc, quand vous investissez en SCPI, vous vous appauvrissez instantanément de ce montant. A contrario, les foncières cotées s’achètent sur le marché boursier avec des frais très réduits. Chez des banques en ligne comme Boursorama (qui n’est pas la moins chère en la matière), il faut compter autour de 0,5% de frais de courtage pour acheter des actions françaises et… c’est tout !
À long terme, le problème le plus grave à mon sens avec les SCPI est que les intérêts de la société de gestion ne sont pas alignés sur ceux des associés. Du fait des frais d’entrée importants, l’intérêt de la société de gestion est de collecter un maximum. Or, il se peut très bien que l’intérêt des actionnaires soit — au contraire — de stopper la collecte. C’est le cas par exemple s’il est impossible d’investir les fonds collectés dans de bonnes conditions du fait d’un marché immobilier devenu peu liquide ou trop cher. Du côté des foncières cotées, le management est généralement internalisé. Autrement dit, la société se gère elle-même. Une foncière qui se développe en augmentant son capital ou en empruntant le fait — en principe — parce qu’elle pense que le marché immobilier présente de belles opportunités. Elle ne le fait en tout cas pas pour augmenter sa rémunération.
Enfin, dernier avantage des SIIC sur les SCPI : la liquidité. Si vous désirez revendre vos foncières, le marché boursier vous assure de pouvoir le faire en quelques minutes. Du moins sur les grosses ou moyennes capitalisations, il y a toujours des acheter car des actions sont échangées constamment.
Vous l’aurez compris, à la question « SIIC ou SCPI ? », je réponds SIIC sans hésitation !
Quels sont les avantages des foncières côtés par rapport à l’investissement locatif en direct ?
L’immobilier en direct subit lui aussi des frais importants. Les mals nommés frais de notaire (le notaire n’en perçoit qu’une fraction) s’élèvent généralement à 8,5%. C’est presque autant que le frais d’entrée des SCPI. S’il y a une agence dans le coup, il fait facilement ajouter 4% à 5% de frais liés à son intervention. À comparer au 0,5% de frais de courtage généralement nécessaires pour acquérir des foncières en bourse. Il n’y a pas photo !
Bien évidemment, les foncières comme les SCPI évitent les tracas de la gestion locative, la gestion des impayés, des travaux et la souscription d’une assurance. Tout cela, la foncière s’en charge directement.
Un aspect souvent pas assez souligné en matière d’investissement locatif en direct, c’est l’extrême concentration de ce type d’opération. Après un premier achat, votre sort ne dépend que d’un bien et d’un locataire. En cas de « pépin » avec ce bien ou votre locataire, toute l’opération périclite. À l’inverse, les foncières (mais aussi les SCPI, soyons honnêtes) diluent le risque sur de multiples biens et locataires. Il est de plus recommandé, d’autant plus que c’est très facile, d’investir dans plusieurs SIIC ou REITs afin d’opérer une diversification plus poussée (voir infra).
Les inconvénients de l’investissement dans des SIIC et REITs
Il est difficile d’emprunter pour acheter des foncières cotées
L’un des principaux avantages de l’investissement immobilier est de pouvoir faire jouer l’effet de levier du crédit. « Vous achetez un bien et c’est le locataire qui paye le crédit » comme le disent les vendeurs de formations bidon sur YouTube. Au-delà de la formule, l’effet de levier est très efficace pour se constituer un patrimoine immobilier (même s’il est très loin d’être exempt de risques).
Or, si les foncières cotées sont un véhicule rêvé pour investir dans l’immobilier, elles ne permettent pas de faire jouer l’effet de levier. Aucune banque n’accepte à ma connaissance de monter un dossier de financement avantageux pour acheter des actions, même des foncières. Certains courtiers permettent l’achat sur marge, mais en France, aucun acteur ouvert au grand public ne propose de système compétitif.
En clair, les SIIC et REITs sont surtout intéressantes si vous avez de l’argent à investir. C’est déjà pas mal, surtout lorsqu’on réalise que les foncières font souvent elles-mêmes jouer l’effet de levier. Elles contractent en effet des crédits ou émettent des obligations pour financer l’achat de nouveaux biens. Si le management sait bien mener ces opérations, l’actionnaire bénéficiera naturellement d’un effet de levier sans même avoir à s’en préoccuper. Toutefois, là aussi, l’effet de levier accentue le risque.
Les foncières cotées ne sont pas éligibles au PEA
Les foncières, même françaises, ne sont pas éligiblent au PEA. Si on y réfléchi, c’est logique, car les dividendes des entreprises françaises afflux sur le PEA sans aucun impôt. Les SIIC n’étant pas soumises à l’IS, les loyers seraient perçus sans aucun impôt sur un PEA !
À noter que certains investisseurs ont la chance d’avoir placé des SIIC en PEA avant que cette règle ne soit instaurée. Les chanceux continuent de percevoir les loyers des foncières presque sans aucun frottement fiscal (tant que l’argent n’est pas retiré du PEA). Ce fut mon cas avec Unibail avant que la fusion ratée avec Westfield oblige à sortir les titres du PEA. J’en rage encore !
Les dividendes des REITs peuvent subir une retenue à la source
Lorsque l’on investit sur des marchés étrangers, il n’est pas rare que les dividendes soient amputés d’une retenue à la source. Il s’agit d’un impôt prélevé par le fisc étranger. Son montant est variable. Pour information, il est de 15% aux États-Unis. Vous toucherez le dividende de vos REITs déduction faite de cette retenue étrangère et des prélèvements sociaux français.
Vous allez me dire « je paye déjà l’impôt en France, pourquoi devrais-je payer un impôt à l’étranger ? ». Vous auriez parfaitement raison ! Généralement, une convention fiscale règle le problème de la « double imposition » pour faciliter les investissements entre les deux pays. En clair, vous êtes en droit de demander au fisc français de tenir compte de l’impôt payé à l’étranger. En pratique, un crédit d’impôt viendra compenser votre taxation excessive.
Ce n’est généralement pas un problème. La surtaxation étant compensée annuellement par le crédit d’impôts. Les investisseurs avec un faible taux d’imposition peuvent toutefois ne pas s’y retrouver. En effet, il s’agit d’un crédit d’impôt non restituable ! C’est-à-dire que si vous ne payez pas d’impôts (ou pas suffisamment), le fisc ne vous remboursera pas le trop-perçu. Votre impôt pourra au mieux être annulé. Si ça ne suffit pas pour compenser le trop-perçu, tant pis !
L’investisseur en foncières cotées doit savoir encaisser les fluctuations de marché
Investir dans des foncières cotées, c’est investir en bourse. Ça n’a l’air de rien, mais ça implique de pouvoir supporter les fluctuations du marché actions. Toutes les heures, toutes les minutes de toutes les journées où le marché est ouvert, la valeur de votre investissement va varier. Parfois dans le bon sens, parfois dans le mauvais et souvent violemment.
Pour supporter ça sur le long terme, il faut en faire abstraction. Si vous achetez un bien immobilier, sa valeur au jour le jour va varier, mais il n’y aura personne pour vous le dire. C’est exactement comme ça qu’il faut envisager un investissement en foncières cotées (et d’ailleurs en bourse en général selon ma philosophie d’investissement).
Beaucoup de personnes paniquent lorsque les cours s’écroulent ou s’emballent lorsqu’ils explosent. Pour elles, l’investissement non coté n’est pas une option, c’est la seule voie apte à leur apporter la sérénité. Malheureusement, seule l’expérience permet de connaître ses réactions en période difficile. Il est très facile de se sentir fort lorsque tout va bien. Par contre, lorsqu’il commence à y avoir du sang sur les murs, que les médias parlent de fin du monde et que votre portefeuille a été divisé par deux en quelques semaines, c’est beaucoup plus dur. Croyez-moi !
Quelles foncières choisir en bourse ?
Je ne vais pas vous dire ici quelles sont mes foncières préférées et je suis de toute façon bien incapable de donner des conseils ! Du reste, vous pouvez consulter la liste des foncières que je possède dans mes reportings. J’ai aussi présenté l’ensemble des SIIC françaises dans cet article.
Si vous manquez d’idée, sachez simplement que parmi toutes les foncières cotées, il y en a pour tous les goûts !
- Les foncières de commerce : Unibail (fr), Klepierre (fr), Macerich (us), Simon property (us)…
- Les foncières diversifiées : Altarea (fr), Icade (fr)…
- Les foncières d’entrepôts et de logistique : Argan (fr), Prologis (us), Stag Industrial (us), Dream Industrial (ca)…
- Les foncière de bureaux : Gecina (fr), Foncière lyonnaise (fr), Dream Office (ca)…
- Les foncières « triple net » : Realty incompe (us), Vereit (us)…
- Les foncières « résidentielles » (appartement, maison…) : AvalonBay Communities (us), American Homes 4 Rent (us)…
- Les foncières d’hôtel : Host Hotels and Resorts (us), Covivio Hotels (fr)…
- Les foncières « santé » : Healthpeak Properties (us)…
- Les foncières de centres de données (data centers) : Equinix (us), Digital Realty (us)…
- Les foncières de tours d’antenne télécom : American tower (us), Crown castle (su)…
Les rendements sont très variables selon les secteurs. S’il est possible de s’approcher des 10% dans l’univers de foncières de commerce, 2% pour une foncière de data centers qualitative est déjà beau !
Comme souvent, le rendement est ici un bon indicateur du risque. Beaucoup d’investisseurs dans des foncières de commerces en ont fait les frais ces dernières années. Croyant faire une bonne affaire en achetant des actions à haut rendement, ils ont perdu des sommes importantes (votre serviteur y compris). Certains ont même perdu la totalité de leurs avoirs avec la faillite de l’anglaise Intu properties ou de l’américaine CBL & associates.
Lors de la construction de votre portefeuille de foncières, évitez donc de vous laisser aveugler par les hauts rendements de certains titres. Généralement, ils sont tout simplement plus risqués que les autres. Au mieux, ce que vous allez gagner en rendement, vous allez le perdre en appréciation du capital. L’analogie avec l’immobilier physique est ici bien utile : que préférez-vous ? Un appartement bien placé dans une ville dynamique à 4% de rendement ou un entrepôt au fin fond de la Russie à 20% ? Lequel sera le meilleur investissement à long terme ?
De manière générale, prenez garde au taux d’endettement. La dette peut en effet devenir un ennemi mortel pour des foncières en perte de vitesse.
Contrairement à ce que l’immobilier véhicule comme image, il peut être très risqué. La bourse ne le rend pas plus ou moins risqué. Si vous investissez en direct dans un immeuble, votre risque sera très concentré sur un bien, un emplacement et un locataire. Ça peut bien se passer comme très mal tourner. La bourse peut justement aider à compenser ces risques en les diluant entre différentes entreprises, différents secteurs et différents pays. Il serait dommage de se priver d’une diversification facile et peu chère.
Il est d’ailleurs possible d’investir dans des foncières via des ETF. Quelques exemples pour une exposition à l’immobilier aux Etats-Unis et en l’Europe :
- iShares U.S. Real Estate ETF
- Vanguard Real Estate ETF
- Amundi FTSE EPRA Europe Real Estate UCITS ETF
- Lyxor STOXX Europe 600 Real Estate UCITS ETF
Un maître mot donc : DIVERSIFIEZ.